Le jugement dernier

30 juin 2010, Michel Gendrel
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“Après la mort, vient le jugement.” (Hé 9.27)

Une première certitude : la mort physique. Elle fait horreur. On n’aime pas en parler. Cependant, ainsi que l’a dit Benjamin Franklin, rien n’est aussi certain. C’est l’expérience quotidienne. À chaque seconde, tous, même les plus jeunes, nous avançons vers la mort.

Une seconde certitude, niée par beaucoup d’occidentaux, mais reconnue depuis l’Égypte ancienne et la Rome antique, sans omettre le livre tibétain des morts ou le Coran : le jugement ! L’Écriture en parle abondamment. Cela fait frissonner, baisser la voix. Mais à vrai dire, les personnes qui croient en ce jugement, non-chrétiennes ou même chrétiennes (c’est-à-dire disciples de Jésus), pensent-elles autant à ce terrible moment qu’à... leur prochain week-end, à la “fête” de Noël, la maison à acheter, les grandes vacances, les enfants ou petits-enfants à élever, plus tard à visiter ?

Le jugement, “doctrine oubliée” (G. Millon), est cependant, on l’a dit, très souvent mentionné dans la Parole de Dieu. Le serviteur fidèle doit annoncer la lumière, mais aussi – avec douleur – les ténèbres, ce qui réjouit comme ce qui (avec raison ?) inquiète, donc et avec l’Écriture, présenter le cadre du jugement, puis le jugement lui-même, avant de proposer en terminant quelques réflexions.

I. Le cadre du jugement

Quand cela aura-t-il lieu ? Qui jugera ? Qui sera jugé ?

A. Quand ce jugement aura-t-il lieu ?

“Jugement dernier”, il interviendra donc au jour du Seigneur, lors du retour de Jésus (rien ne paraît alors présenter une pluralité de jugements), à l’achèvement de l’ “âge”, à l’époque de la moisson : pluralité d’expressions, pour ce fait unique. C’est là une double nécessité :

Il ne semble pas y avoir auparavant de royaume terrestre millénaire de Christ.

B. Qui jugera ?

Ici, des versets nous surprennent : “Les douze” assis sur des trônes pour juger les douze tribus d’Israël” (Mt 19.28 ; Lc 22.30) ; à ceux ainsi assis est donné le pouvoir de juger (Ap 20.4). Les chrétiens jugeront le monde et les anges (1Co 6.2-3) !

C’est que les enfants de Dieu seront tellement unis à Lui qu’ils participeront à son action : par pure grâce, il les prendra pour assesseurs, coopérant à ses décisions et appuyant son verdict.

Mais ce sera Dieu le juge : Dieu le Père, ainsi que le précisent de très nombreux versets, tant de l’Ancien Testament (Ec 12.1,16 ; Ps 75.3 et 96.13...) que du Nouveau Testament (Rm 14.10 ; Hé 11.6 et 12.23 ; 1P 1.17...) Ce sera PAR Jésus, auquel “il a remis tout jugement” (Jn 5.22 et 27). Christ est tout spécialement qualifié : homme, il connaît parfaitement la nature humaine ; Dieu, il a autorité, et rien ne lui est caché.

Comme le rappelle le Credo, “Il jugera les vivants et les morts”. Les textes abondent. Outre les deux textes précités, rappelons notamment : Actes 10.42 ; 17.31 ; 2Co 5.10 ; 2Tm 4.8...

On l’a dit : Jésus est omniscient. Parfaitement juste (cf. Gn 18.25), il ignorera tout favoritisme (Rm 2.11 ; Ga 2.6). “Petits” ou “grands”, tous auront devant lui la bouche fermée (cf. Rm 3.19). Et, vu la perfection de ce juge, il ne saurait être question d’interjeter appel de ce vrai tribunal pénal international !

Mais quels seront ces “petits” ou “grands” ?

C. Qui jugera-t-on ?

Ce seront les anges et les hommes.

Sans insister sur les premiers (v. 1Co 6.3, précité ; 2P 2.4 ; Jude 6), penchons-nous sur le jugement des hommes, du monde (Rm 3.6).

Seront jugés individuellement (chacun rendant compte pour lui-même, Rm 14.12), tous les hommes (enfants inclus) ayant vécu ou encore vivants (Mt 25.32 ; Ac 10.42 ; Ap 20.12 et 13) : les païens de Tyr et de Sidon, tout comme les Juifs de Chorazin et de Bethsaïda (Mt 11.22-24)... et les milliards d’êtres humains actuellement en vie sur notre planète...

Tous les hommes seront jugés, donc aussi les chrétiens. Cela a été précisé par Paul aux croyants de l’église de Rome (Rm 14.10), ainsi qu’à ceux de l’assemblée de Corinthe (2Co 5.10) : “Il nous faut tous comparaître devant le tribunal de Christ” (et non simplement sa tribune, comme l’unique terme grec – béma – l’a fait soutenir).

Dure Écriture, penseront certains, mais c’est là l’Écriture !

Le cadre en étant ainsi posé, envisageons, toujours selon la seule Écriture,

II. Le jugement

Que jugera-t-on et selon quels critères ?

A. Le regard divin s’étendra à tout : faits, paroles et pensées

Or, si l’homme ne peut regarder qu’à l’apparence, devant le Seigneur rien ne sera plus caché (1Co 4.5 précité, Rm 2.16). Ce sera fort pénible pour la personne (qui sait fort bien se cacher la vérité !), surtout si cela est révélé publiquement.

Tout sera jugé. Mais quelle sera la norme divine ?

B. Le (ou les) critères (s) du jugement divin

Jésus, peu avant la fin de son ministère terrestre, l’a solennellement déclaré : “La parole que j’ai annoncée est celle qui jugera (le désobéissant) au dernier jour” (Jn 12.48) À partir de ce verset, et d’autres de l’Écriture (Ap 20.12, notamment), il est possible d’esquisser, dans un certain “clair-obscur”, ce que devrait être la direction divine. Bien que le classement soit pour nous parfois malaisé à effectuer, cela conduit à une distinction fondamentale entre non-chrétiens et chrétiens.

S’agissant de l’existence future du chrétien près du Seigneur, une graduation est présentée par l’Écriture : selon l’utilisation qu’il aura faite (1P 4.10), après sa conversion, des talents (Mt 25.14-30) ou mines (Lc 19.13-25) que Dieu lui a confiés, l’un sera proche du trône, mais l’autre assez loin...

L’activité des élus serait intéressante à esquisser à partir du peu qu’en dit la Bible. Cela conduirait toutefois un peu loin. Mieux vaut résumer l’ensemble de cette présentation d’un sujet « difficile à traiter avec amour » (R. Murray McCheyne), en disant : « l’incroyant sera jugé selon ses œuvres, le croyant sera récompensé selon les siennes » (H.C Thiessen).

III. Remarques

Proposons quelques réflexions quant à la naissance, puis à la qualité de la foi.

A. La foi qui sauve

Elle peut n’apparaître qu’en fin de vie (évoquons l’exemple du “bon larron”, Lc 23.40-43). Ne perdons pas espoir : Dieu seul sait ce qui se passe entre l’incroyant qui meurt et Jésus. Il ne faut pas cesser, jusqu’à la mort de ceux qui nous sont chers, d’intercéder et de témoigner !

En revanche, à vue humaine, qu’elle est désolante la situation de trop de personnes (dites ou non “de l’extérieur”), assidues à nos cultes et réunions, qui entendent rappeler régulièrement l’offre de salut du Seigneur, et qui demeurent des “sympathisants”.

B. Le contenu de la foi

« Beaucoup crieront Christ, Christ qui, au jugement, seront beaucoup moins proches de lui que celui qui ne connaît pas Christ ». Cette citation de Dante conduit à sonder cette affirmation, rarement explicitée si elle est toujours présentée : celui qui croit est sauvé. C’est exact, et nous l’avons rappelé, s’il s’agit d’une foi réelle, d’une foi qui sauve : obéissante et productrice de fruits, d’œuvres d’amour révélant la foi (Jc 2.18,26 ; cf. aussi, entre autres, Hé 12.14).

En l’absence d’obéissance, de fruits, d’œuvres manifestant la foi (persévérante), pas de salut (Mt 7.21-27 ; 25.12) !

Les œuvres sont-elles réelles mais indigentes ? La vie spirituelle testée par “le feu” est-elle comparable à un petit tas de cendres ? Cette situation, qui sera sans doute fréquente, permet du moins le salut (1Co 3.15).

« Que de surprises il y aura », murmurait le doyen G. Million !

Il n’est pas question pour nous, n’est-ce pas, de prétendre envoyer “les bons” au ciel, les “mauvais” en enfer : tous les hommes sont mauvais. À chacun de nous, disciples de Jésus, il appartient tout au contraire de démontrer, en actes comme en paroles, que Christ est bien notre Seigneur, et donc notre Sauveur. Qu’il puisse, le jour du jugement, nous dire : “C’est bien, bon et fidèle serviteur (littéralement esclave), tu as été fidèle en peu de choses, entre dans la joie de ton maître"; (Mt 25.21,23).


[1] Pour l’apôtre Paul, il est clair qu’après sa mort il sera auprès du Seigneur.